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Redynamiser la croissance dans la zone euro

Intervention de Yves Mersch, membre du directoire de la BCE,à l’Institute of International European Affairs,Dublin, 7 février 2014

Mesdames et messieurs,

Je vous remercie de m’avoir invité à prendre la parole aujourd’hui. C’est un plaisir pour moi d’être ici, en Irlande, alors que le pays vient de clore’ son programme d’ajustement et de retrouver son autonomie économique. Même s’ils ne sont pas au bout de leurs peines, les Irlandais ont ’été un exemple pour le reste de la zone euro, ils ont montré comment faire face à une période de difficultés économiques : en saisissant les problèmes à bras-le-corps, en prenant les mesures nécessaires, ce qui leur a permis de rebondir aussi vite que possible.

Nous pouvons nous réjouir que la reprise semble s’installer aussi dans le reste de la zone euro. À en croire les dernières données disponibles, la croissance économique continue ’de s’accélérer grâce à une activité soutenue non seulement par les exportations nettes, mais aussi par la consommation intérieure. La reprise demeure cependant relativement faible et irrégulière, et il reste un long chemin à parcourir pour faire baisser les taux de chômage très élevés. Cela nous amène à nous demander comment retrouver une croissance soutenable dans l’ensemble de la zone euro.

À mon avis, nous ne pouvons espérer beaucoup de la relance par la demande. La politique monétaire restera accommodante aussi longtemps que nécessaire, mais ce n’est pas la panacée. Elle nous permet simplement de gagner du temps. Les politiques budgétaires, quant à elles, sont nécessairement entravées par un fort endettement. En outre, si le secteur privé connaît actuellement une période de désendettement, nous ne pouvons pas – et nous ne devons pas – nous attendre à un retour à une expansion de la demande globale alimentée par l’emprunt, comme dans le passé.

Cela signifie que, pour raviver la croissance, nous devons nous intéresser surtout à la capacité d’offre de l’économie, c’est-à-dire au potentiel de croissance. Or, dans ce domaine, la situation n’est pas encourageante. D’après la Commission européenne, le potentiel de croissance de la zone euro a reculé de 2,2 % en 2000-2007 à 0,9 % pour la période 2008-2012. Nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour renverser la situation et, dans mon intervention d’aujourd’hui, je souhaiterais m’interroger sur la façon d’y parvenir.

Pourquoi la croissance potentielle a-t-elle diminué ?

Je voudrais commencer par examiner pourquoi le potentiel de croissance a diminué durant la crise et les défis qui en découlent pour les autorités. J’utiliserai une définition large du potentiel de croissance : il s’agit de l’activité économique qui peut être assurée par les facteurs de production disponibles – capital, main-d’œuvre et technologie – sans engendrer de tensions inflationnistes ni d’essor suivi d’un effondrement des prix des actifs.

S’agissant tout d’abord du capital, l’investissement a beaucoup souffert de la crise, puisqu’il a reculé au total de plus de 15 % dans la zone euro depuis le maximum atteint en 2008. Évidemment, il peut s’agir, dans une certaine mesure, d’une évolution conjoncturelle, ou du résultat d’un nécessaire processus de correction après le surinvestissement dans le secteur de la construction. Cependant, nous avons aussi assisté à une contraction marquée et, jusqu’à présent persistante, de l’investissement des entreprises. Une telle contraction risque de peser sur les gains de productivité futurs puisque cet investissement tend à provoquer une hausse du contenu technologique du capital. En outre, une période prolongée d’investissement inférieur à sa moyenne de long terme pourrait également entraîner un excédent d’épargne et, de ce fait, une baisse du taux d’intérêt naturel.

En ce qui concerne l’offre de main-d’œuvre, la situation n’est pas plus réjouissante. Un facteur positif a été une augmentation d’environ 1 point de pourcentage du taux d’activité dans la zone euro pendant la crise, alors que les États-Unis enregistraient une diminution de plus de 3 points de pourcentage. Il convient toutefois de replacer cette augmentation dans le contexte d’une hausse de 3 % à 6 % du chômage à long terme dans la zone euro, ce qui risque d’entraîner une érosion des compétences et une inadéquation entre offre et demande de compétences. Ces risques ne sont pas négligeables étant donné que le chômage touche essentiellement les travailleurs peu qualifiés : environ 20 % d’entre eux sont au chômage, contre 7 % seulement de la main-d’œuvre hautement qualifiée.

Enfin, la productivité globale des facteurs – qui reflète essentiellement le progrès technologique à long terme – n’a que peu diminué durant la crise, sans doute du fait de la sous-utilisation des intrants de la production. Cela n’est toutefois pas d’un grand réconfort, car la productivité globale des facteurs affichait une tendance baissière dans la zone euro bien avant la crise ; de plus, elle s’est redressée moins vite qu’aux États-Unis [1].

Ces évolutions placent les autorités devant deux interrogations interdépendantes. Premièrement, comment empêcher que le ralentissement de la croissance observée ne se répercute sur la croissance potentielle ? La principale difficulté consiste ici à éviter que l’augmentation du chômage à long terme et le niveau structurellement faible de l’investissement ne créent des effets d’hystérésis.

Deuxièmement, comment renforcer la croissance potentielle de façon durable ? En adéquation avec ma définition large du potentiel de croissance, des travaux récents laissent penser que celle-ci a pu être surestimée avant la crise en raison d’effets liés au cycle financier [2]. En d’autres termes, la croissance potentielle pourrait avoir été inférieure si l’on tient compte d’informations concernant les évolutions insoutenables des taux d’intérêt réels, de l’expansion du crédit et des prix immobiliers durant la période 2003-2008. Ainsi, un retour au statu quo risque de ne pas suffire pour rétablir un niveau d’emploi durablement élevé.

Ces questions sont interdépendantes car, si nous parvenons à relever la croissance potentielle future, les anticipations de croissance aujourd’hui s’en trouveront influencées. Les entreprises et les ménages pourraient avancer leurs décisions de consommation et d’investissement, contribuant donc à réduire le risque d’effets d’hystérésis. A contrario, sans perspective de croissance plus forte à l’avenir, nous pourrions être victimes d’anticipations négatives auto-réalisatrices.

C’est pourquoi j’estime urgent de prendre des mesures sur ces deux fronts. Il convient, à mon avis, d’agir dans trois domaines importants : politique monétaire ; redressement du secteur financier ; et, surtout, réformes structurelles.

Comment renforcer le potentiel de croissance ?

Politique monétaire

Nous savons que la politique monétaire peut aider à gagner du temps pour mettre en œuvre les mesures structurelles nécessaires. Au-delà de ce rôle, il peut sembler étrange de mentionner la politique monétaire dans une discussion sur la croissance potentielle. Avant la crise, on s’accordait en effet à dire avec assurance que la politique monétaire ne pouvait pas affecter l’offre. Elle pouvait contribuer à stabiliser la production autour de sa tendance de long terme, mais pas influer sur cette tendance.

Depuis quelque temps, les banquiers centraux se posent toutefois la question de savoir si la politique monétaire peut avoir des effets plus durables. Par exemple, une longue période de faible demande peut-elle créer des effets d’hystérésis, une politique monétaire plus accommodante stimulant l’économie pourrait-elle prévenir une baisse permanente de la productivité ? En d’autres termes, la politique monétaire peut temporairement éviter qu’un recul conjoncturel de la croissance ne devienne trop rapidement structurel.

La question n’est pas encore tranchée. Il est évident que la capacité d’offre de l’économie est déterminée par ses caractéristiques structurelles, et que la politique monétaire ne peut assurer cette fonction. Néanmoins, d’aucuns pensent que la politique monétaire peut jouer un rôle « défensif » en période d‘atonie économique. En ce qui nous concerne, en assurant le maintien de la stabilité des prix, conformément à notre mandat, si nous ne pouvons pas renforcer le potentiel de croissance, nous pouvons peut-être limiter l’ampleur de sa baisse, ou retarder celle-ci.

L’efficacité de la politique monétaire dans la zone euro a malheureusement été altérée, pendant la crise, par la fragmentation financière, spécialement dans les pays qui ont le plus besoin de faibles taux d’intérêt. Mais certains signes ’montrent que la politique monétaire recommence à produire des résultats dans la zone euro, notamment par le biais du canal des prêts bancaires.

Du côté des emprunteurs, les conditions de financement bancaire se sont considérablement détendues depuis la mi-2012. Le risque de contrepartie interbancaire a chuté, comme en témoigne la nette contraction des écarts de rendement entre prêts garantis et non garantis sur le marché monétaire. En outre, les taux de référence, et surtout les rendements des emprunts souverains, ont réagi de façon beaucoup plus homogène à nos abaissements des taux.

Pour les bailleurs de fonds, la transmission de nos décisions en matière de taux à la tarification des prêts bancaires est encore inégale entre pays de la zone euro, mais la dispersion a considérablement diminué. Notre dernière enquête sur la distribution du crédit bancaire ( Bank Lending Survey) a également confirmé la stabilisation des critères d’octroi des prêts, particulièrement dans les pays en proie à des difficultés.

En un mot, il y a lieu d’être optimiste quant à la transmission efficace de notre orientation monétaire accommodante à l’économie réelle, cette dernière pouvant, de ce fait, contribuer à atténuer les répercussions d’une période prolongée de ralentissement économique sur le potentiel de croissance. Cependant, il est également manifeste que de faibles taux d’intérêt ne peuvent renforcer la croissance sur une base structurelle. Le plus important pour véritablement stimuler la productivité est que les crédits soient accordés là où ils sont le plus productifs.

Je voudrais maintenant passer à la question du redressement du secteur financier.

Redressement du secteur financier

D’abondantes données empiriques donnent à penser qu’un puissant facteur de la croissance de la productivité agrégée est la rotation des entreprises – les moins productives quittent le marché pour faire place à d’autres, nouvelles et innovantes, ou les entreprises existantes réaffectent leurs ressources vers des secteurs plus productifs [3]. Le secteur financier doit s’assurer que l’allocation du crédit soutienne ce processus.

Cependant, il semble que les banques ayant des bilans fragiles aient retardé ce processus, du moins dans certaines parties de la zone euro. Selon une étude récente, les grands établissements bancaires ont retiré leur crédit aux entreprises présentant le plus de risque, empêchant l’arrivée de nouveaux venus, tandis que les établissements de plus petite taille se sont mis à renouveler leurs prêts aux emprunteurs incapables d’en rembourser le principal ( ever-greening of loans), ce qui empêche les sorties [4].

Les établissements fragiles semblent avoir aussi ralenti la réallocation entre secteurs. Je ne donnerai qu’un exemple : en Grèce, l’allocation sectorielle des crédits n’a pas véritablement profité aux entreprises orientées vers l’exportation, malgré des améliorations récentes de leur compétitivité en matière de coûts et de prix [5]. Ceci donne à penser que les banques de certains pays de la zone euro ne favorisent pas suffisamment les secteurs plus productifs.

Il s’ensuit que le redressement du secteur financier doit être au centre de toute politique visant à renforcer le potentiel de croissance de la zone euro. Or, pour s’assurer que les prêts soient attribués aux activités productives, il existe, à mon avis, deux priorités.

La première consiste à assainir les bilans des banques – c’est-à-dire reconnaître les pertes de façon adéquate et procéder à une recapitalisation en bonne et due forme. C’est pourquoi l’évaluation complète des banques que nous menons actuellement est si importante. Elle nous permettra non seulement de restaurer la confiance dans le secteur, mais aussi de créer les conditions d’un relèvement plus rapide du potentiel de croissance.

Cette évaluation présente un autre avantage : elle empêche que les faibles taux d’intérêt de la BCE n’encouragent les banques et les entreprises à retarder la restructuration. Elle nous permet ainsi de conserver l’orientation monétaire appropriée pour la zone euro, tout en atténuant les éventuelles répercussions négatives liées à une mauvaise allocation des ressources.

La seconde priorité est de favoriser d’autres sources de financement dans la zone euro et de développer le financement par les marchés des capitaux, de sorte que la croissance à long terme de la productivité ne soit pas si dépendante de la santé des banques. C’est, dans une certaine mesure, ce qui se passe naturellement : les entreprises des grands pays ont déjà commencé à remplacer les prêts bancaires par des émissions de titres et d’actions. Toutefois, cette solution, en règle générale, ’n’est pas accessible aux PME, ce qui les rend très vulnérables aux tensions du secteur bancaire.

C’est pourquoi j’insiste pour soutenir la revitalisation du marché des titres en Europe, source qui s’est pratiquement tarie ces dernières années. Il s’agit selon moi d’un outil important pour aider les banques à gérer le risque de crédit associé aux prêts qu’elles accordent aux PME. Toutefois, pour que ce marché puisse se redresser, il est crucial que le traitement réglementaire des titres adossés à des actifs ( asset-backed securities, ABS) repose sur des données réelles, et non sur des informations issues de la débâcle des prêts hypothécaires à risque (les subprime) aux États-Unis. Notre expérience des ABS, ici, en Europe, est très différente : entre la mi-2007 et le premier trimestre 2013, le taux de défaillance sur ABS dans l’Union européenne était d’environ 1,4 % seulement, contre 17,4 % aux États-Unis [6].

Réformes structurelles

Si le redressement du secteur financier peut contribuer à assurer que les prêts bénéficient aux entreprises les plus productives, nous devons également nous poser la question suivante : d’où viendront ces entreprises ? Les raisons qui poussent une société à exploiter les économies d’échelle, à investir et à innover – en un mot, à être productive – dépendent largement de la conjoncture économique. Nous devons donc veiller à réunir les conditions économiques favorables.

Cela m’’amène au sujet central : les réformes structurelles. Pour parler simplement, nous ne pourrons parvenir à une hausse du potentiel de croissance sans ces réformes. Elles sont essentielles pour renforcer les composantes tendancielles des intrants (investissement et main-d’œuvre) et l’efficacité de leur utilisation (productivité globale des facteurs).

Je voudrais tenter d’expliquer pourquoi.

Premièrement, alors que l’investissement peut repartir à la hausse dans la zone euro à mesure que l’incertitude causée par la crise diminue, l’investissement tendanciel, pour sa part, n’augmentera que si de nouvelles opportunités s’offrent aux entreprises pour mettre au point des modèles opérationnels différents et se développer. Dans les économies de la zone euro, la meilleure façon d’y parvenir consiste à s’attaquer aux obstacles réglementaires – par exemple, les lois d’urbanisme limitant l’expansion du commerce de détail ou les règles sur le transport empêchant les projets transfrontières.

Un rapport récemment publié par une société de conseil a révélé que, en Europe, 45 % de l’investissement en capital fixe était concentré sur les secteurs largement réglementés par les pouvoirs publics, ce qui signifie que des réformes structurelles dans ces secteurs pourraient notablement stimuler l’investissement [7]. Et, comme de nombreux projets d’investissement offrent un rendement pendant des dizaines d’années, on pourrait les rendre viables grâce à des changements de réglementation, même dans une économie relativement atone.

Deuxièmement, en raison de la faiblesse des évolutions démographiques en Europe, une augmentation de l’offre de main-d’œuvre tendancielle ne sera pas possible sans de nouvelles mesures de réforme. Nous savons qu’elles peuvent fonctionner. La hausse du taux d’activité pendant la crise provient largement de mesures antérieures visant à relever le taux de participation des femmes ainsi que d’initiatives concernant la retraite anticipée et les pensions, qui ont accru la participation des travailleurs plus âgés.

La difficulté à ce stade est d’’étendre cette action aux groupes qui ont souffert pendant la crise, notamment les jeunes et les travailleurs peu qualifiés. Les principales mesures en ce domaine consistent à réduire la dualité des marchés du travail et à passer de politiques passives (comme les prestations chômage qui ne dépendent pas des incitations à trouver un emploi) à des mesures actives (comme l’aide à la recherche d’emploi et la formation).

Il sera également essentiel d’améliorer les conditions de mobilité transfrontalière de la main-d’œuvre, surtout dans les pays subissant un vieillissement accéléré de la population. Ainsi, l’OCDE prévoit que le potentiel de croissance de l’Allemagne se repliera à moins de 1 % très peu de temps après 2020 en raison d’une pénurie de main-d’œuvre qualifiée [8]. En outre, une augmentation de l’immigration risque d’entraîner un plus grand dynamisme de la demande privée, notamment une demande accrue de dépenses d’investissement.

Troisièmement, il est peu probable que la productivité globale des facteurs parvienne à inverser sa tendance baissière sans des réformes structurelles destinées à améliorer l’allocation des ressources. Ces réformes, qui encouragent la concurrence et réduisent les rentes économiques, garantissent que les ressources – et les rémunérations – se dirigent vers des secteurs à haute productivité, ce qui soutient l’innovation et le progrès technologique. Selon une étude récente, une intensification de la concurrence dans les secteurs exportateurs et non exportateurs en Italie pourrait faire augmenter la production de 4,0 % en cinq ans et de 7,7 % à long terme [9].

En outre, l’une des explications de la faible progression de la productivité globale des facteurs avant la crise était les barrières structurelles qui ralentissaient l’adoption et la diffusion des technologies de l’’information et de la communication (TIC), surtout dans le secteur des services [10]. Les réformes visant à approfondir l’intégration des marchés entre pays de la zone euro – comme l’application complète de la directive « Services » – pourraient donc stimuler la productivité par ce canal.

Tout ceci peut sembler n’être que pure théorie. L’exemple de l’Irlande fournit toutefois une illustration concrète. Grâce à des réformes structurelles antérieures, les prix relatifs se sont ajustés dans ce pays presque immédiatement après la récession de 2008-2009, de sorte que l’économie a rapidement commencé à recouvrer sa compétitivité. Le taux de chômage s’est mis à baisser en 2012, reculant de 14 % en décembre à 12 % un an plus tard. En revanche, dans d’autres pays bénéficiant d’un programme d’ajustement qui avaient une économie moins flexible, la reprise a débuté bien plus tard.

Même si nous devons être prudents avec les relations de cause à effet, le net recul de l’investissement observé en Irlande au cours des cinq dernières années semble avoir pris fin. Durant les trois premiers trimestres de 2013, la formation de capital fixe a diminué en termes annuels, mais, si l’on ne tient pas compte de l’effet d’une baisse des achats d’avions, la reprise sous-jacente de l’investissement paraît s’être accélérée.

Tout ceci laisse penser que l’Irlande applique les politiques adéquates pour renforcer son potentiel de croissance ’futur et aussi qu’elle les applique de façon soutenable, sans lien avec le cycle financier. Le niveau actuel des écarts de rendement sur obligations d’État irlandaises montre que cette analyse est largement partagée par les marchés financiers.

J’espère toutefois que ces bonnes nouvelles ne pousseront pas à la complaisance, car l’Irlande est toujours confrontée à des défis considérables sur plusieurs fronts. Elle doit poursuivre l’assainissement des bilans des secteurs public et privé ; elle doit réduire les taux de chômage encore élevés pour les chômeurs de longue durée et les jeunes ; enfin, elle doit rétablir le bon fonctionnement du secteur bancaire, de sorte que celui-ci soutienne l’économie domestique, au lieu de l’entraver, à mesure qu’elle émerge de la crise.

Conclusion

Je voudrais maintenant conclure mon intervention.

Les défis auxquels fait face la zone euro aujourd’hui pour renforcer son potentiel de croissance ne sont pas nouveaux. Depuis les années 1990, nous savons que les conditions de l’offre dans la zone euro doivent être réformées. C’était le but que n’a jamais atteint l’agenda de Lisbonne. Et, de fait, c’est dans ce contexte qu’ont été prononcés des mots désormais célèbres sur l’’incompatibilité entre réforme et réélection.

Ce qui est nouveau, en revanche, c’est le caractère urgent des mesures. Nous sommes désormais confrontés au risque d’une diminution structurelle de la croissance. Nous ne pouvons plus nous permettre d’ajourner les mesures nécessaires, ni d’attendre trop de la politique monétaire. Les réformes structurelles sont une étape indispensable.

De ce fait, l’apparente contradiction entre réforme et réélection est aujourd’hui discutable, tout simplement parce que les citoyens veulent la croissance et que, sans réformes, elle ne se concrétisera pas. Il n’existe pas de pays de la zone euro où les réformes ont été reportées et où les citoyens sont satisfaits des résultats économiques obtenus.

Lorsque je pense à la zone euro d’aujourd’hui, je me souviens des mots de Winston Churchill : « Toujours faire ce qu’il faut, après avoir épuisé toutes les alternatives ». Pendant vingt ans, nous avons épuisé toutes les alternatives en Europe. Maintenant, je pense que la seule solution qui nous reste est la bonne.

Mesdames et messieurs, je vous remercie de votre attention.

  1. [1] Voir « PIB potentiel, sous-utilisation des capacités et lien avec les évolutions nominales depuis le début de la crise », Bulletin mensuel de la BCE, novembre 2013.

  2. [2] Voir Claudio Borio, Piti Disyatat et Mikael Juselius, « Rethinking potential output: Embedding information about the financial cycle », BIS Working Papers, février 2013.

  3. [3] Voir, par exemple, Foster, Lucia, Haltiwanger et Syverson, « Reallocation, Firm Turnover, and Efficiency: Selection on Productivity or Profitability? »,  American Economic Review, 98(1), pp. 394-425, 2008.

  4. [4] Cf. Albertazzi et Marchetti, « Credit crunch, flight to quality and evergreening: an analysis of bank-firm relationships after Lehman », Document de travail, Banque d’Italie, 2010

  5. [5]  Études économiques de l’OCDE : Grèce 2013, novembre 2013

  6. [6] Voir Standard & Poor’s, « Transition Study: Less Than 1.5% Of European Structured Finance Has Defaulted Since Mid-2007 », 11 juin 2013. Voir également Moody’s Investors Service, « Structured Finance Rating Transitions: 1983-2013 », 7 juin 2013, ainsi que Fitch Ratings, « The Credit Crisis Four Years On … Structured Finance Research Compendium », juin 2012, et « EMEA Structured Finance Losses », août 2011.

  7. [7]  Investing in Growth: Europe’s Next Challenge, McKinsey Global Institute, décembre 2012

  8. [8]  Études économiques de l’OCDE : Allemagne 2012, février 2012

  9. [9]Lusine Lusinyan et Dirk Muir, « Assessing the Macroeconomic Impact of Structural Reforms: The Case of Italy », Document de travail du FMI, janvier 2013.

  10. [10]Ramon Gomez-Salvador, Alberto Musso, Marc Stocker et Jarkko Turunen, « Labour Productivity Developments in the Euro Area », Études spécifiques de la BCE, n° 53, octobre 2006

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