Options de recherche
Page d’accueil Médias Notes explicatives Recherche et publications Statistiques Politique monétaire L’euro Paiements et marchés Carrières
Suggestions
Trier par

Remise du prix franco-allemand de la Culture

Mot de remerciement par le Président de la Banque Centrale Européenne Jean-Claude Trichet
Berlin, 4 septembre 2006

Sehr geehrter Herr Bundesfinanzminister Steinbrück,
sehr geehrter Herr Präsident Seidel,
sehr geehrter Herr Professor Pohl,
sehr verehrte Gäste,

Zuerst vielen herzlichen Dank, Herr Steinbrück, für Ihre freundlichen Worte und Ausführungen, die mich sehr bewegt haben.

Es ist für mich eine sehr große Ehre, heute den Deutsch-Französischen Kulturpreis zu erhalten, und ich möchte mich bei der Europäischen Kulturstiftung “Pro Europa „ ganz besonders für diese Würdigung bedanken.

Wie bereits von Ihnen, Herrn Steinbrück erwähnt, liegen Kultur und Geldpolitik nicht weit auseinander.

In Ihren Statuten, Herr Seidel, steht, dass “Pro Europa„ dem lebendigen Dialog zwischen den europäischen Staaten und Regionen Impulse geben will. Der Euro, die einheitliche und stabile Währung für bald 13 europäische Länder, mit der jeder einzelne Bürger kaufen, verkaufen, investieren und reisen kann, trägt zur Förderung genau diesen Dialoges zwischen den unterschiedlichen europäischen Kulturen bei. Daher haben meiner Meinung nach, der Euro sowie die Europäische Zentralbank und die Europäische Kulturstiftung „Pro Europa“ einiges gemeinsam.

Mesdames et Messieurs,

Les rapports entre l’économie et la culture sont très anciens et intimes. La langue française ne parle-t-elle pas du commerce des esprits ? Laissez-moi vous faire part de deux observations que j’ai toujours personnellement trouvées fascinantes.

La première concerne la naissance de l’écriture. Il y a 6000 ans, à SUMER, étaient inventés les premiers idéogrammes. Ils descendaient en droite ligne des jetons d’argile que les administrateurs sumériens utilisaient pour établir la comptabilité des productions agricoles et donc des échanges qui s’ensuivaient avec les premières villes. Les tout premiers scribes étaient aussi les premiers administrateurs et les premiers comptables !

La seconde concerne un facteur commun, qui m’a toujours fasciné, entre la poésie et la monnaie. La fonction fondamentale de la monnaie est la stabilité, la préservation de la valeur, l’inaltérabilité, en sus de deux autres fonctions centrales que sont la mesure et l'échange. Le même principe de stabilité, de préservation, est la marque de la poésie qui a été inventée – avant l’écriture – pour assurer l’inaltérabilité de la parole. Le poème, comme la pièce de métal précieux, a été construit, frappé pour être inaltérable.

L’Europe elle-même, l’Europe de la paix, de l’unité et de l’amitié, s’est construite et doit absolument continuer de se construire sur l’enrichissement culturel, sur la fertilisation croisée des cultures, sur l’étoffe étroitement tissée des admirations culturelles mutuelles. Ceci caractérise toutes les cultures de l’Europe au sein desquelles les cultures allemande et française offrent des exemples impressionnants anciens et actuels.

Vous avez mentionné, Monsieur le Ministre, mon attachement à la stratégie de désinflation compétitive et à la stabilité du franc. Vous avez mentionné la négociation du traité de Maastricht voulu par les Européens, par l’Allemagne et par la France. Et je ne peux manquer de mentionner le nom du Président Köhler avec lequel j’ai eu tant de discussions professionnelles, parfois aisées, parfois difficiles, et toujours amicales. Et aussi celui de Hans Tietmeyer et plus récemment celui d’Otmar Issing. Le lien franco-allemand dans la préparation de la monnaie unique a été si important.

Je suis aujourd’hui à Francfort, la cité de Goethe.

Peu d’illustrations aussi frappantes des liens culturels entre l’Allemagne et la France au temps des Lumières que l’aventure de l’édition du « Neveu de Rameau » de DIDEROT. DIDEROT écrit cette satire, particulièrement incisive à l’égard de nombreux contemporains, mais ne la publie pas. Le texte français du « Neveu de Rameau » se trouve dans les documents personnels qu’il avait vendus, avec sa bibliothèque, à Catherine II de Russie. C’est ce texte de Saint-Petersbourg qui tombe dans les mains de KLINGER, poète dramatique allemand, puis parvient à SCHILLER, lequel se hâte de le communiquer à GOETHE. Et voilà comment, en 1805, GOETHE lui-même traduit en allemand ce qu’il considère comme « l’un des chefs d’œuvre de DIDEROT », lui donne son titre « Rameaus Neffe » – alors qu’il semble bien que le texte français originel était intitulé « Satire seconde » – et accompagne cette publication d’une étude et de commentaires (Anmerkungen) témoignant de son très grand intérêt.

Le premier texte français paraît 16 ans après la publication allemande ! Encore n’est-ce pas le texte original de DIDEROT mais une traduction française de la traduction de GOETHE, rédigée par deux faussaires, de SAUR et de SAINT-GENIÈS, qui donnent la retraduction de la traduction pour une édition originale inédite ! Il faut attendre 1875 pour avoir en français la première édition complète et non altérée, mais pas encore parfaite, du « Neveu de Rameau », soixante-dix ans après la publication en allemand !

Je ne peux non plus manquer d’être ému quand je pense que Bonaparte, partant pour son expédition en Egypte, emportait avec lui le Werther de GOETHE qui avait été un véritable coup de tonnerre dans l’Europe littéraire. Et je suis encore plus impressionné quand je lis dans ECKERMANN la confirmation par GOETHE que lors de sa rencontre avec Napoléon, celui-ci lui avait bien demandé d’élucider un passage de Werther qu’il trouvait obscur…

Cet enrichissement culturel mutuel est toujours extrêmement vivant. Je reconnais dans la littérature française les écrivains qui ont fait des études germaniques à leur style qui porte la trace de leur imprégnation culturelle. Et je note en passant que l’un des écrivains français les plus remarquables aujourd’hui, peut-être l’un des deux ou trois plus grands en France, est Julien GRACQ qui est nourri d’HÖLDERLIN et de NOVALIS.

Aujourd’hui, le renforcement des liens culturels entre les deux pays touche une part beaucoup plus large des populations qu’au temps des Lumières, comme en témoignent le nombre de jumelages entre les communes de ces deux pays, la multiplication des liens personnels entre nos concitoyens, ainsi que les initiatives développées par les Instituts Goethe, les Instituts Français, ou l’Office Franco-Allemand pour la Jeunesse, le « Deutsch-Französisches Jugendwerk ».

Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Monsieur l’Ambassadeur, Mesdames et Messieurs, c’est un motif de grande fierté pour le Président de la Banque centrale européenne que je suis, de voir la monnaie unique européenne – elle-même très puissant symbole de l’unité entre les Européens et de leur amitié – agir aussi comme un très puissant outil pour renforcer les liens culturels entre tous les pays européens, et au sein de ceux-ci entre l'Allemagne et la France.

Je vous remercie de votre attention.

Vielen herzlichen Dank für Ihre Aufmerksamkeit.

CONTACT

Banque centrale européenne

Direction générale Communication

Reproduction autorisée en citant la source

Contacts médias