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Interview avec Le Figaro

7 avril 2014

Entretien de Benoît Cœuré, membre du directoire de la BCE,
avec Alexandrine Bouilhet, Le Figaro, conduit le 4 avril 2014

Le Figaro: -La hausse des marchés financiers n’est-elle pas déconnectée de la réalité économique?

Benoit Coeuré: Les marchés anticipent une reprise économique. C’est bon signe, et nous pensons qu’ils ont raison! Ce n’est pas un mal en soi d’anticiper une reprise! A la BCE nous considérons que la reprise est déjà là, mais nous la savons graduelle et fragile et nous voulons donc l'accompagner avec des taux d’intérêts bas, voire plus bas, sur une période prolongée.

Cette hausse ne fabrique-t-elle pas déjà des bulles ?

Non, pas en zone euro, de notre point de vue. Mais dans une période de taux d'intérêt très bas, la vigilance s'impose. Si ce risque se matérialisait, les autorités prudentielles des Etats membres disposent de nouveaux instruments dits "macroprudentiels", sans parler des autres mesures macroéconomiques.

La BCE est-elle vraiment prête à passer à l’assouplissement quantitatif (QE)?

Oui, il y a unanimité dans le conseil des gouverneurs pour se tenir prêt à utiliser des instruments non conventionnels, y compris celui-ci, si la période actuelle d’inflation basse se prolonge plus que prévu. Aujourd’hui, cela ne nous semble pas nécessaire, car le faible niveau de l'inflation est dû à des facteurs en partie temporaires et nous croyons à la reprise : l’inflation devrait donc remonter. Mais nous continuerons de suivre les évolutions très attentivement et agirons si nécessaire.

En quoi l’assouplissement quantitatif peut-il aider à la reprise du crédit?

C’est toute la question! Même si le QE se traduit par plus de liquidités dans le bilan des banques, il n’est pas sûr que cela crée du crédit. La BCE ne peut se substituer à l’assainissement des banques. La revue des bilans bancaires que nous menons en 2014 y contribuera. Un QE à l’européenne serait nécessairement différent de ce qui se pratique aux Etats-Unis.

En en parlant, Mario Draghi a fait baisser l’euro. Pourquoi?

Les intervenants de marché ont maintenant bien compris que le taux de change n’est pas un objectif de notre politique monétaire mais qu'il n’en est pas moins une variable importante pour notre prise de décision, car il influence l’évolution des prix. En période de basse inflation, les conséquences des mouvements des taux de change font l’objet d'un suivi attentif.

Que faudrait-il faire pour que l’euro baisse davantage?

Si l’euro est à ce niveau face au dollar, c’est aussi parce que la zone euro affiche un excédent de ses comptes courants important –[ndlr : 286 milliards d’euros prévus en 2014] - et qui va croissant. C’est nouveau. Avant, la balance courante de la zone euro était plutôt à l’équilibre. Ce n’est parce que l’Allemagne, par exemple, exporte trop, comme on l’entend parfois, mais parce que la demande intérieure de la zone euro est déprimée. De ce point de vue, la meilleure réponse est donc de soutenir la demande intérieure en investissant, et c'est aussi une manière de préparer l'avenir de l'Europe! Mais ces questions de taux de change dépassent le seul cadre européen.

A 1,37 dollar, l’euro n’est-il pas surévalué pour la France?

La France est dans une situation particulière au sein de la zone euro car elle est le seul pays de la zone à avoir un déficit courant aussi important aujourd’hui –[NDLR : 36 milliards d’euros en 2013 ]-. La réponse passe par des gains de compétitivité, comme le prévoit le gouvernement.

La France demande un nouveau délai pour ses déficits: risque-t-elle la sanction des marchés?

Les attentes de l’Europe à l’égard de la France sont fortes, car c’est la deuxième économie de la zone euro. La zone euro a besoin d'une France forte. La France a aussi une responsabilité: rendre crédible le gouvernement économique de la zone euro qu’elle a appelé de ses vœux et qui se met progressivement en place. Cette gouvernance prévoit des objectifs de déficits nominaux et structurels. Comme l'a rappelé la Commission européenne, la France a déjà bénéficié deux fois d’un report. Elle doit respecter ses engagements. C’est une question de crédibilité et de confiance.

La France peut-elle se passer de l’euro?

Sans l‘union européenne et sans l’euro, la France serait une puissance moyenne et vulnérable, car surendettée et avec une productivité déclinante. L’euro et l’Europe offrent à la France une protection qui lui permet de rester maîtresse de son destin en gérant elle-même son processus de réforme.

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